Armin Meiwes, le cannibale de Rotenburg

Armin Meiwes est né le 1er décembre 1961, en Allemagne à Essen, une cité industrielle située non loin de Düsseldorf. À l’âge de huit ans, son père Dieter Meiwes, un policier, l’abandonne avec sa mère prénommée Waltraud, et ses deux demi-frères Wolfgang et Ingbert issus de son premier mari. Peu de temps après, eux aussi quittent la maison de Wüstefeld (minuscule commune faisant partie de Rotenburg) laissant Armin et Waltraud seuls, dans l’immense manoir familial composé de 50 pièces. Très autoritaire, sa mère fait de son fils son souffre-douleur qui devient introverti et solitaire, s’inventant un compagnon imaginaire appelé Franky. Dans son esprit, ce dernier est grand, blond et fort. Armin Meiwes découvre petit à petit son homosexualité et développe en parallèle des fantasmes de sadomasochisme et de cannibalisme. Dans ses rêves les plus fous, il se voit abattre et dévorer certains de ses camarades de classe. Adolescent, Armin Meiwes rendait souvent visite à la célèbre occultiste allemande de sinistre réputation Ulla Von Bernus, qui était voisine et meilleure amie de sa mère.

À l’âge de 19 ans, Armin Meiwes s’engage dans l’armée pour voir du pays, mais il ne connaîtra aucun dépaysement. Il sera affecté à une caserne située à moins d’une demi-heure de Rotenburg, et rentre tous les soirs chez sa mère dont la santé commence à décliner. S’occupant de cette dernière et de l‘entretien de la maison, il n’a que très peu de loisirs, mais nourrit une passion pour l’informatique qu’il peut exercer en intérieur. Il en fait son métier en devenant informaticien. Plus tard, certains de ses collègues diront de lui qu’il était gentil, affable et discret, quand d’autres encore raconteront qu’il avait tout du vieux garçon en devenir, qu’il n’avait pas d’ami et qu’il faisait semblant de s’intéresser aux femmes.

Profitant du développement de l’internet, il cherche rapidement à entrer en contact avec des hommes qui partagent ses obsessions. Sa mère ne se doute pas que sa progéniture est un monstre en gestation, et elle ne le saura jamais. À sa mort en 1999, Armin Meiwes hérite du manoir et le réaménage selon ses fantasmes. Il passe le plus clair de son temps sur Internet qui n’en est qu’à ses débuts. Il surfe sur des sites et des forums homosexuels, mais aussi sur d’autres plus spécialisés, ayant pour thèmes la torture, le sadomasochisme et le cannibalisme. Armin Meiwes existe sur ses réseaux sous le pseudonyme de Franky le boucher. Dans l’ancien fumoir situé au deuxième étage, il crée une véritable salle de torture carrelée dotée d’un ingénieux système de poulies et crochets, ainsi qu’une table de dissection. Alors âgé de 38 ans, Armin Meiwes accumule en pagaille un grand nombre de cassettes vidéos et des magazines pornographiques homosexuels. Il stocke sur des centaines de disquettes et des dizaines de disques durs ses conversations tenues sur les forums, mais aussi de nombreuses photos d’hommes suppliciés. Pour ses projets, il s’équipe d’un jeu de couteaux et d’un matériel de boucherie destiné à pendre une carcasse. Ses fantasmes commencent à prendre forme dans le réel.

En 2001, Armin Meiwes passe plusieurs fois la même annonce sur divers sites homosexuels, mais plus particulièrement sur le forum du site internet spécialisé The Cannibal Café : «Franky [alias Armin Meiwes, ndlr] cherche candidat bien monté et âgé de 18 à 30 ans pour abattage et consommation immédiate.» Il ne s’imagine pas que quelqu’un va la prendre au sérieux, mais bien vite, il se rend compte que certains ne sont pas indifférents à celle-ci. Plusieurs hommes répondent à l’annonce, mais tous se rétractent quand ils comprennent le sérieux et la détermination de son auteur qui accepte de les laisser partir. Celui qui lui semble le plus déterminé à aller jusqu’au bout se met à trembler et à vomir quand Armin Meiwes s’apprête à l’éviscérer. Dépité, il relâche l’homme terrifié qui ne contactera pas la police pour autant. Ainsi, ils sont environ une bonne dizaine à défiler dans sa maison avant qu’il ne puisse enfin réaliser son fantasme.

Un beau jour, un certain Cator répond positivement à l’annonce. Derrière ce pseudonyme se cache Bernd Jürgen Brandes, un ingénieur berlinois de 43 ans, homosexuel et adepte de souffrance extrême. Sadomasochiste convaincu, il se dit volontaire pour le projet et les deux hommes se rencontrent dans la nuit du 9 au 10 mars 2001, dans la demeure d’Armin Meiwes. Souffrant de troubles de la personnalité, Bernd Jürgen Brandes souhaite en finir avec la vie, mais en apothéose. Il assure à Armin Meiwes avoir tout vendu et mis ses affaires en ordre avant de mourir. Il le rassure également en lui disant avoir effacé toutes leurs conversations sur les forums pour ne pas que l’on puisse établir de lien et remonter jusqu’à eux. Avant de se rendre chez Armin Meiwes, Bernd Jürgen Brandes a ingurgité une grande quantité de somnifère, une bonne vingtaine, et bu du schnaps. Après plusieurs rapports sexuels et de longs moments à discuter, les deux hommes passent aux choses sérieuses. Armin Meiwes actionne son système d’enregistrement vidéo et Bernd Jürgen Brandes s’installe nu sur la table de dissection pour s’y laisser attacher. Il est conscient quand son amant lui sectionne le pénis avec son consentement. Endolori par les somnifères et l’alcool, il ne hurle pas et regarde Armin Meiwes s’éloigner avec son membre sectionné dans sa cuisine pour le préparer. Il tente de le rôtir en le faisant flamber avec du rhum, mais le pénis est trop cuit et impossible à mastiquer. Bernd Jürgen Brandes lui-même en fait la remarque alors qu’Armin lui donne des morceaux de son propre pénis à manger.

L’homme perd de plus en plus de sang et commence à sombrer dans l’inconscience. Armin Meiwes le conduit à la salle de bain pour l’immerger dans sa baignoire pour un bain bien chaud. Pendant qu’il se vide de son sang jusqu’à la mort, Armin Meiwes va dans son salon pour y lire une histoire de Star Trek en attendant, tout en allant voir Bernd Jürgen Brandes de temps à autre. Ce dernier finit par sortir de son bain, titube, puis s’effondre sur le sol de la maison. Armin Meiwes l’égorge avec l’un de ses couteaux de cuisine pour le faire passer de vie à trépas. Il suspend le corps dans son abattoir privé avec son système de poulie et entreprend de découper le corps. La scène ayant été filmée intégralement du début à la fin, les faits ont pu être vérifiés par le parquet. Il congèle les morceaux consommables et enterre les os dans le jardin. Pendant plusieurs semaines, il mange plusieurs kilos de viande, ce qui lui procure à chaque repas une jouissance sexuelle. Il élabore des menus raffinés, agrémentés de bonnes sauces et de grands vins. Dans un documentaire, il raconte son crime : «J’ai décoré la table avec de jolies bougies. J’ai sorti mon meilleur service de table et cuit une pièce de rumsteak, de son dos. J’ai fait ce que j’appelle des pommes princesses et des choux de Bruxelles. Ensuite, j’ai mangé. Le premier morceau était très étrange. C’est un sentiment que je ne peux pas décrire. J’avais passé 40 ans à attendre ça, à rêver de ça (…) Sa viande avait le goût de porc, mais en plus fort.»

Après son acte, Armin Meiwes se vante sur ses forums qu’il est allé au bout de son fantasme et désire obtenir un nouveau candidat pour poursuivre ses intérêts érotico-cannibales. L’un de ses contacts sur internet, un étudiant autrichien, le dénonce à la police. Sans preuve pour le moment, les autorités placent Armin Meiwes sous surveillance, puis parviennent à établir une corrélation entre lui et la disparition de Bernd Jürgen Brandes qui n’a pas donné signe de vie depuis dix mois. Les perquisitions effectuées au domicile d’Armin Meiwes donnent lieu à de nombreuses découvertes, notamment celle du fameux enregistrement vidéo de la mise à mort de sa victime consentante. Celui-ci dure plus de neuf heures et va horrifier les enquêteurs. Placée sous scellée comme pièce à conviction, seules quelques images fuiteront sur internet. Armin Meiwes est arrêté le 10 décembre 2002, soit plus d’un an et demi après son crime.

L’Allemagne horrifiée découvre l’incroyable histoire d’Armin Meiwes et de son amant Bernd Jürgen Brandes. Son procès retentissant ne manque pas de faire la une de tous les médias. Dès son arrestation, Armin Meiwes est placé dans un établissement psychiatrique en vue d’y être expertisé. Les autorités redoutent qu’il ait commis d’autres crimes, mais Armin Meiwes étant très loquace, ils comprennent vite que ce dernier n’a tué qu’une seule fois. Finalement déclaré pénalement responsable de ses actes, il est incarcéré. Malgré une défense basée sur le consentement de sa victime et la notion de suicide assisté, il écope d’une peine de huit ans et demie de prison, le 30 janvier 2004, pour homicide involontaire par le tribunal de Cassel.

Derrière les barreaux, Armin Meiwes admet avoir cannibalisé Bernd Jürgen Brandes et exprime des regrets pour ses actes. Il entreprend de rédiger son autobiographie, soit disant achetée à prix d’or par un important éditeur selon ses dires, dans le but de dissuader tous ceux qui seraient tentés de suivre ses traces. Son récit ne sera jamais publié. En avril 2005, le Parquet juge sa peine insuffisante et saisit la Cour Fédérale d’Allemagne pour un pourvoi en cassation afin de rejuger Armin Meiwes pour assassinat à caractère sexuel. Le procès débute le 12 janvier et la perpétuité est demandée par l’accusation. L’événement fait grand bruit car il est question de savoir si oui ou non, tuer quelqu’un avec son consentement peut être considéré comme un meurtre. Le 9 mai 2006, le tribunal de grande instance de Francfort condamne Armin Meiwes à la réclusion criminelle à perpétuité.

Fin 2007, Armin Meiwes se déclare désormais adepte du véganisme et s’implique dans un groupe de défense de la nature, dont il serait devenu le leader au sein de sa prison, selon ses codétenus. Les responsables de l’établissement pénitencier prétendent qu’on pourrait en théorie laisser les portes de sa cellule ouvertes toute la journée sans que rien ne se passe. Courant 2020, la justice autorise Armin Meiwes à effectuer des sorties à l’extérieur de la prison pour se promener dans une autre ville, mais de façon très encadrée et incognito. Caché par une casquette, des lunettes de soleil et sous l’escorte de deux policiers, il peut effectuer de courtes balades dans le cadre de sa réinsertion. Toutefois, en janvier dernier 2020, une liberté conditionnelle a été refusée par le parquet de Francfort qui estime qu’il n’y a pas de « pronostic social favorable ».

Inspiration dans la culture populaire : Le groupe de metal industriel allemand Rammstein sort une chanson intitulée Mein Teil. Ce titre est présent dans l’album Reise Reise sorti en 2004. Dans le clip, on peut voir le chanteur habillé en cuisinier pousser un énorme chaudron dont sort, entre deux salves de flammes, l’un des membres du groupe jouant le rôle de Jürgen Brandes. Un autre musicien de Rammstein interprète quant à lui la mère d’Armin Meiwes. Le film Confession d’un cannibale (Grimm Love) sort en 2010. Son synopsis est le suivant : Fascinée par le cannibalisme et par l’affaire Armin Meiwes, l’étudiante Katie Armstrong entreprend des recherches toujours plus approfondies sur le sordide fait divers pour sa thèse, mais sa quête se transforme en obsession. C’est un film mou et plutôt moyen sans grand intérêt. Moins médiatique, le film Cannibal, réalisé en 2006 par l’Allemand Marian Dora est bien meilleur. Le métrage expérimental très sombre du réalisateur underground retrace de façon magistrale et réaliste la relation entre Armin Meiwes et Bernd Jürgen Brandes, jusqu’au grand crime final.

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